Les scientifiques pensent que la colonisation de poissons dans des plans d’eau isolés serait liée aux canards de deux façons différentes : la première serait que les œufs se collent à leurs pieds ou à leurs plumes. La deuxième serait liée à l’ingestion d’œufs non digérés par les canards.

Afin de prouver que les canards transportaient bien des œufs dans leur tube digestif, une équipe de chercheurs a réalisé deux expériences, dont les résultats ont été publiés cet été.

La première expérience est de prendre des canards colvert, un canard barboteur, et de les nourrir avec des œufs de carpe commune. Dans la seconde expérience, de nourrir cette fois ci d’autres canards colvert avec des œufs de carpes prussienne. Les deux poissons choisis pour cette expérimentation sont très féconds, une carpe commune peut pondre jusqu’à 1,5 million d’œufs.

Afin d’avoir des résultats, les scientifiques ont collecté – sur un plateau plastique – les excréments au bout de 1, 2, 4, 6, 8, 12 et 24 h après les avoir gavés. Puis les ont immédiatement trempés dans l’eau filtrée de la rivière (du canal principal de l’Est en Hongrie). Ainsi, ils ont pu retrouver dans les excréments, 8 œufs de carpe commune intacts et 10 œufs de carpe prussienne. Les oiseaux mâles ont permis le passage de davantage d’œufs que les femelles (rapport de 15 pour 3).

Les scientifiques concluent donc que l’expérience fournit la preuve que des embryons de poissons aux œufs à chorion mou peuvent survivre au passage dans le tube digestif de vertébrés, démontrant ainsi la possibilité d’endozoochorie*. Elle fournit également une possible explication sur la manière dont les poissons peuvent coloniser différents types de plans d’eau isolés.

Par ailleurs, des études sur l’alimentation des oiseaux ont déjà montré qu’ils se nourrissent fréquemment d’œufs de poissons dont la présence a déjà été observée dans le tube digestif de différentes espèces de canards barboteur et plongeurs (mais aussi de goélands et d’oiseaux de rivage). Par exemple, plus de 200 œufs de poissons ont été enregistrés chez un seul colvert et certains oiseaux peuvent se nourrir de grandes quantités d’œufs lors des périodes de frai** des poissons.

Pour conclure, les humains ne pourraient donc pas être les seuls « agents de dispersion » de poissons sur notre planète. Cependant, contrairement à la population d’oiseaux, les humains auraient une capacité de transport beaucoup plus rapide.

Mais ces résultats expérimentaux ne peuvent pas nous exonérer des responsabilités que porte notre espèce dans la dispersion planétaire de diverses espèces de poissons d’eau douce aux très fortes capacités de dommages environnementaux dans les régions de leurs introductions.

* endozoochorie : (endo : à l’intérieur, zôon : animal, chor : disséminer) méthode de dissémination des graines via le tube digestif d’un animal (après consommation et digestion du fruit ou appât).
** frai : ponte des œufs.

Accéder à la publication scientifique

 

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